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Pneumologie

Publié le 03 avr 2023Lecture 4 min

Dépistage du cancer du poumon par scanner à faible dose - Les généralistes se préparent

Vincent BARGOIN, Paris

Le dépistage du cancer du poumon se profile en France. Comme souvent, les généralistes seront en première ligne. Lors du 16e Congrès Médecine Générale France, le Pr Bernard Frèche (Université de Poitiers) a fait le point sur le sujet.

La HAS s'est longtemps montrée réticente au dépistage du cancer du poumon par scanner à faible dose. Publiée en 2011, l'étude américaine NLST (National Lung Screening Trial), avait pourtant montré un bénéfice du dépistage en termes de mortalité(1). Mais ce bénéfice avait été jugé trop faible, et le surdiagnostic trop important pour lancer ce dépistage en France. Les choses ont changé en 2020 avec la publication de l'essai néerlando-belge NELSON (Nederlands–Leuvens Longkanker Screenings Onderzoek), qui met en avant une réduction de 24 % du risque de décès par cancer du poumon à 10 ans chez les hommes dépistés, et de 33 % chez les femmes(2). « Les radiologues se sont immédiatement montrés intéressés, de même que les généralistes, puisque ce sont eux qui vont repérer les sujets à risque », souligne le Pr Frèche. Après l'avis favorable de la HAS à la réalisation d'études pilotes, l'AP-HP a lancé l'an dernier la cohorte prospective CASCADE, qui prévoit de recruter 2 400 femmes âgées de 50 à 74 ans, ayant fumé au moins 20 paquets-années (30 paquets-années dans NLST), et qui ont, le cas échéant, arrêté depuis moins de 15 ans. L'étude devra répondre à un certain nombre d'interrogations, en particulier vérifier que les clichés sont correctement interprétés par un seul radiologue, formé et aidé d'un logiciel ad hoc. En attendant, d'autres questions se posent, sur lesquelles une revue de la littérature, présentée par le Pr Frèche, apporte des éléments de réponse(3).   Pour commencer, le dépistage a-t-il un impact sur le tabagisme ?   Selon une analyse de la NLST, la réponse est oui : la découverte d'anomalies, suspectes ou non d'être cancéreuses, est significativement associée à l'arrêt du tabac, avec un recul de 5 ans.   Quel est par ailleurs l'impact psychologique du dépistage ?   À moyen et long terme, il se révèle neutre, montre une étude britannique. Vrai-faux paradoxe, l'étude montre que c'est dans le groupe contrôle que l'anxiété face au cancer est statistiquement la plus importante à 2 ans — même si l'écart avec le groupe dépisté n'est pas cliniquement significatif, précisent les auteurs. En revanche, l'espoir d'englober, dans le dépistage du cancer du poumon, d'autres affections liées au tabac, n'est pas confirmé pour le moment. Selon un travail néerlandais, le scanner de dépistage, qui permet de mesurer la calcification au niveau des coronaires et des valves aortique et mitrale, n'apporte rien en termes de prédiction des événements CV. « L'examen ne convient pas davantage au diagnostic de l'emphysème ou d'une BPCO », ajoute le Pr Frèche. En ce qui concerne la radio-exposition, un travail italien estime le risque de cancer induit à 0,05 % à 10 ans, soit un cas pour 108 cancers dépistés dans cette étude. Les auteurs concluent que le risque « peut être considéré comme acceptable en regard de la réduction substantielle de mortalité associée au dépistage ». Il n'en reste pas moins « non négligeable », et incite à optimiser le rapport bénéfice/risque par une sélection précise des patients orientés vers le dépistage. Enfin, concernant les coûts, on dispose d'une étude française publiée en 2015, qui, sur la base des résultats de NLST, estime le nombre de sujets éligibles au dépistage entre 1 650 288 et 2 283 993, avec un résultat compris entre 3 600 et 10 118 cancers de stade 1 ou 2 dépistés chaque année. Le nombre de faux positifs serait compris entre 5 991 et 16 839, entraînant de 1 416 à 3 981 chirurgies injustifiées, pour un coût annuel compris entre 105 et 215 millions d'euros. Le chiffre peut sembler élevé, mais il serait entièrement couvert par une augmentation de 5 à 10 centimes du prix du paquet de cigarettes, notent les auteurs. Parallèlement aux essais pilotes, se met en place une organisation du dépistage en France. « L’État a demandé à l'INCa de rédiger un cahier des charges », indique le Pr Frèche, qui ajoute qu'un comité doit se réunir prochainement pour définir les critères d'orientation vers le dépistage. S'agissant de l'imagerie, il remarque que « les radiologues vont devoir faire face à un grand nombre d'examens normaux », et qu'il faut donc les former à la reconnaissance des nodules cancéreux, avec une place, sans doute, à l'intelligence artificielle dans la lecture des clichés. Autre sujet de préoccupation : les plages d'utilisation des scanners ; il faut veiller à ne pas engorger les services. Dès à présent, même si les choses avancent à petite échelle, « nous avons commencé à prescrire des dépistages, conclut le Pr Frèche, et nous serons amenés à en prescrire de plus en plus ». D'après la présentation du Pr Bernard Frèche, au 16e Congrès Médecine Générale France, session « Prévention primaire et secondaire », 24 mars 2023

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