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Douleur

Publié le 12 avr 2023Lecture 4 min

Cannabis contre la douleur : l'ANSM prolonge l'expérimentation

Vincent BARGOIN, Paris

L'expérimentation nationale du cannabis médical contre la douleur va se prolonger une année supplémentaire. Il s'agit de se donner le temps de la réflexion sur le futur statut du cannabis médical, et d'impliquer davantage de MG dans le suivi des patients.

Pour préciser les conditions d'une prescription médicale du cannabis en France dans le contexte de la douleur, l'ANSM a lancé en mars 2021 une expérimentation dans cinq indications : les douleurs neuropathiques réfractaires ; certaines épilepsies sévères et pharmaco-résistantes ; les soins de support en oncologie ; les soins palliatifs ; la spasticité douloureuse dans la SEP et d'autres maladies du SNC. Prévue pour durer 2 ans, et inclure 3 000 patients suivis et traités durant au moins 6 mois, cette phase initiale vient d'être prolongée jusqu'en mars 2024. La première année, 739 patients avaient été inclus, dont 208 étaient sortis d'étude pour inefficacité ou effets indésirables. Le score au questionnaire DN4, qui permet de repérer les douleurs neuropathiques, était supérieur à 7 dans 98 % des cas. Le score moyen sur l'échelle EQ-5D VAS, de qualité de vie, était de 44/100. Ce score s'est amélioré de 30 % entre le premier et le 6e mois, avec une évolution particulièrement marquée les 3 premiers mois (21 %), le score passant à 54/100. À 6 mois, ce score était de 58/100. Des évolutions positives sont par ailleurs enregistrées en s’appuyant sur des échelles d’évaluation de la douleur en particulier d’origine neuropathique, ainsi que sur les jugements cliniques des praticiens. On note enfin que l'Inserm et l'Assurance maladie ont lancé en parallèle une étude sur la baisse de prescription des principaux médicaments que le cannabis est susceptible de remplacer (tramadol, cymbalta, dépakine…), ce qui donnera une autre lecture des résultats. Pour Nathalie Richard, (Directrice de l'expérimentation du cannabis à usage médical à l'ANSM), la prolongation de l'expérimentation va permettre de consolider les données, mais elle vise surtout à préparer « l'après ». Sur le plan juridique, d'une part, il s'agit de « faire entrer le cannabis médical dans le droit commun », en définissant son statut, et sa prise en charge par l'Assurance maladie. Tâche peu évidente, semble-t-il, puisque « pour le moment, aucun pays, en Europe ou dans le monde, n'a réussi à définir clairement un statut du cannabis médical ». En termes de production, d'autre part, il est prévu de développer une culture du cannabis médical en France (décret du 18 février 2022), pour remplacer à terme les produits importés. Dans l'immédiat, le véritable enjeu semble être le recrutement de médecins généralistes, pour prendre le relais des quelques 324 centres de référence volontaires. Le schéma de l'expérimentation est le suivant. Le MG a d'abord pour rôle d'orienter un patient éligible au centre anti-douleur de référence. Le médecin de la structure initie la prescription lors d'une consultation dite « complexe ». Le patient revient alors vers le MG, qui effectue le suivi, et peut, à partir de 2 mois d'inclusion, réaliser lui-même la titration et les changements de posologie. En pratique cependant, beaucoup de patients sont suivis exclusivement en centre de référence, où les délais d'attente s'allongent. On souhaite donc, à l'ANSM, que les généralistes prennent plus de place dans le dispositif. Un obstacle souvent évoqué est l'aspect chronophage. Pour suivre des patients sous cannabis médical, il est d'abord nécessaire de suivre une formation en ligne. Elle dure quelques heures, et s'inspire largement de l'expérience acquise à l'étranger, en particulier au Canada, où le cannabis médical est prescrit depuis plus de 20 ans. Par ailleurs, pour le MG comme pour le pharmacien qui délivre les produits, le suivi des patients implique la transmission de données nombreuses, au travers de procédures très sécurisées, donc lourdes. Pour faciliter les choses, l'ANSM a modifié certaines conditions de l'expérimentation. Depuis le 28 mars dernier, le registre national de suivi ReCann est ainsi allégé de ses données logistiques (commandes, stockage, délais…), la déclaration des effets indésirables est facilitée, et la formation sera validée non plus par la réussite à un QCM mais par une simple déclaration sur l'honneur. Enfin, l'ANSM annonce son intention d'associer plus étroitement les MG à l'expérimentation. Sont ainsi prévues des actions d'information et de communication, la création d'un groupe de travail de 10 MG à l'ANSM, et le renforcement de la participation des MG au Comité scientifique temporaire de l'expérimentation. Le prochain rapport sur l'expérimentation est annoncé pour septembre 2023. Il devrait présenter des données sur le relais vers la ville, ainsi que des données d'efficacité, de pharmaco-vigilance et d'addicto-vigilance.

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